Nicolas Chassagne et Florian Dubos (Kyo) – Interview

Par Woodbrass Team

Les français de Kyo avaient bouleversé le paysage pop rock en 2003 avec leur énorme album Le Chemin, vendu à plus d’un million d’exemplaires. 300 Lésions, sorti l’année suivante, s’est placé au sommet des charts et confirmait ce talent certain pour l’alliance entre guitares épaisses et mélodies accrocheuses. Mais la machine s’est arrêtée au sommet de sa gloire, sans avoir eu le temps de tout gâcher, laissant sur leur faim des milliers de fans. Dix ans plus tard, le monstre marin Kyo refait surface avec l’album L’Equilibre qui prouve bien qu’il n’a rien perdu de sa superbe, et a au contraire gagné en maturité. Alors que leur énorme tournée Graal remplit les salles de France et de Navarre, le guitariste / chanteur Florian Dubos et le guitariste Nicolas Chassagne sont passés au showroom Woodbrass Deluxe nous raconter les circonstances exceptionnelles de ce retour réussi.

openingNicolas (gauche) et Florian (droite)

Avez-vous ressenti de l’appréhension à l’idée de redémarrer ?
Florian :
Oui bien sûr… On s’est toujours dit qu’on allait le faire, mais chacun avait ses projets et lorsque tu lances un album avec tournée les cycles durent autour de trois ans.
Nicolas : Nous sommes partis à un moment où ça marchait plutôt bien, c’était donc la sortie idéale. Revenir là-dessus c’est forcément prendre un risque. Si les gens ne sont pas au rendez-vous, si tu passes à côté, tout le monde restera sur cette impression. Mais nous avons toujours eu confiance en nous.
Florian : On savait qu’il y aurait au moins de la curiosité de la part du public. Donc si on faisant quelque chose de bien, il y aurait des gens pour s’y intéresser. On a pris le temps de le faire bien. On a travaillé pendant deux ans et demi sur le disque, on a écrit soixante morceaux comme d’habitude. Il n’y a pas forcément de paroles définitives sur tous ces morceaux mais ils ont leurs mélodies et leur structure.
Nicolas : Ce choix nous permet de créer un album avec du relief, ça évite les doublons.

Quelle est votre préparation pour une tournée pareille ?
Florian :
On a fait une première semaine de répète très tôt, en juin, pour se faire un point global sur l’état avancé d’oubli de nos parties ! On voulait intégrer un clavier et c’était donc aussi l’occasion de répéter avec lui. On a donc fait un premier bilan et après ça on a répété pendant un mois entier, en passant trois semaines à apprendre les nouveaux titres et réapprendre les anciens. Il y a des choses qui reviennent tout de suite et d’autres où tu te demandes « c’était quoi cet arpège » ? Surtout qu’on met en général quatre arpèges par chanson…
Nicolas : Il y a aussi des morceaux qu’on a essayé et qui ne marchaient pas dans les conditions du live, nous ne les avons donc pas gardés.

boardfloLe pedalboard de Florian. Rang du haut de gauche à droite : Electro Harmonix Holy Grail Plus, MXR Phase 90, MXR Tremolo, RAT Deucetone, Boss Super Octave, Boss Noise Supressor, Boss Chromatic Tuner. Rang du milieu : Xotic RC Booster, Maxon OD-808, Xotic SP Compressor. Rang du bas : pédale d’expression Roland EV-5, TC Electronic Flashback X4, Looper MIDI

Avez-vous été tentés de tout modifier sur les anciens morceaux ?
Florian :
Le public n’a pas envie que l’on change tout sur les vieux titres qu’ils ont bien aimé, on l’a fait sur certains titres mais sur des singles comme Dernière Danse ou Le Chemin nous sommes restés très proches.
Nicolas : Nous avons pris plaisir à les rejouer puisque ça faisait dix ans qu’on ne les avait pas sortis !
Florian : C’est un peu plus maîtrisé, les voix sont plus posées qu’avant, c’était donc plutôt cool de les retrouver. à la fin de la période de répétition nous avons fait cinq jours de filage (ndr : un filage consiste à jouer le concert entier dans l’ordre prévu par la setlist au cours d’une répétition) en ajustant les sons et les sessions Pro Tools avec nos ingés. Cette fois-ci le batteur voulait juste jouer sans avoir à déclencher les séquences et c’est donc le clavier qui s’y colle. Nous sommes aussi passés aux in-ear monitors donc nous avons fait les moulages et ajusté l’équilibre du mix, puis nous avons fini par deux jours de filage dans une grande salle de théâtre.

Vous utilisez de moins en moins de guitares différentes au fur et à mesure que la tournée progresse, n’est-ce pas ?
Nicolas :
Oui, même pendant les répètes le nombre de guitares utilisées diminue considérablement. Tu les amènes toutes parce que tu les as achetées, mais très vite tu vois bien qu’il y en a une qui convient mieux que les autres. Du coup en concert tu es content de la garder tout du long, parce qu’il faut avoir ce côté régulier. Il faut compter une vingtaine de minutes de chauffe pour se sentir bien dessus. C’est ainsi que ta main va accéder à ces dix pour cent supplémentaires qui sont très précieux, puisque sur scène tu es moins posé qu’en studio.
Florian : J’en ai deux principales, un pour chaque accordage (l’une en Ré et l’autre en Mi), plus une spare de chaque (ndr : une guitare spare est une guitare de secours, qui ne sera utilisée que si la principale est défaillante ou si une corde casse). Je suis en drop D sur ma PRS et en Mi sur ma Strat, une japonaise noire et blanche sur laquelle j’ai mis des mécaniques à blocage et un système de switch qui permet d’activer le humbucker de la position chevalet quelle que soit la position déjà enclenchée. C’est un Seymour Duncan, le Jeff Beck JR. Je me sers d’une Les Paul pour les titres avec un capodastre, c’est une Standard de 88.
Nicolas : Moi j’ai ressorti une vieille Les Paul Standard de 1978 que j’avais achetée il y a vingt ans. Elle est restée au placard pendant un bon moment car les frettes étaient très usées et elle est très lourde, c’est la plus lourde de toutes nos guitares ! Je l’ai faîte refretter et il faut bien reconnaître qu’en terme de son elle passe au-dessus de toutes les autres : c’est gros, c’est précis, pour les arpèges c’est super beau… J’ai donc décidé de partir avec et de me faire mal au dos !

lespaulLa Les Paul de Nicolas

Ça n’est pas trop fatiguant pour toi soir après soir ?
Nicolas :
C’est surtout en répète que c’est épuisant, puisque nous répétons huit heures par jour, et on passe beaucoup de temps à discuter debout sans même jouer, la guitare reste donc pendue à ton cou.

Utilisez-vous la Stratocaster et la Les Paul pour avoir des sons complémentaires ?
Nicolas :
On a tous les deux commencé sur Strat mais je suis vite passé sur Gibson. Il y a sans doute une volonté inconsciente de se démarquer l’un de l’autre et de se compléter.
Florian : Nous avons aussi écouté les bons conseils de notre ingé son, mais ça s’est vraiment fait naturellement. Avant la tournée j’avais essayé la Jaguar signature Kurt Cobain, j’ai trouvé ça excellent en disto, c’est un tube ! Et dès que tu joues un riff de Nirvana, tu es direct dedans… Mais avec ma Strat j’ai à peu près la même chose grâce au humbucker en position chevalet.

stratmodLa Strat modifiée de Florian

Et côté amplis ?
Nicolas :
Pendant les répètes j’avais essayé une tête Fender Bassman et je trouvais ça excellent pour avoir un peu plus de graves, mais au dernier moment je me suis dégonflé et je suis reparti sur un Diezel, l’ampli que nous utilisons tous les deux. En tournée il vaut mieux avoir du matos que tu connais bien. Ça manque un peu de personnalité mais ça fait très bien le boulot. D’une salle à l’autre tu gardes un son solide.

Comment contrôlez-vous vos pédales ?
Florian :
Nous contrôlons tout avec un pédalier MIDI. Toutes les pédales sont allumées mais les boucles s’activent uniquement quand j’en ai besoin. Tu prépares tous tes presets, c’est facile, sauf quand il y a un gros changement de setlist !

boardnicoLe pedalboard de Nicolas. Rang du haut de gauche à droite : Boss Digital Reverb, MXR Phase 90, MXR Tremolo, Proco RAT, Buffer, Suhr Koko Comp, Boss Chromatic Tuner. Rang du bas : Looper MIDI, Strymon Timeline, Dunlop Crybaby.

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